LEAN et AGILE deux méthodes aux finalités différentes
Elles ne sont pas neutres dans l’organisation du travail. Elles touchent toutes les deux aux organisations mais sur des angles différents. Le LEAN se préoccupe du processus et de la recherche des temps non productif, AGILE se préoccupe du produit en final et des acteurs.
La méthode LEAN est caractérisée par la recherche optimum des processus par les acteurs dans la détection des temps de travail non productif, c’est à dire ne produisant pas de Valeur Ajoutée. Le but final étant de les éradiquer et de réduire les temps de production. La perversité de la démarche est que salarié organise lui-même sa surexploitation au détriment de sa santé parce qu’il est vu plus en outil du processus qu’en individu. Dans le fond ce qui est central ce n’est pas le salarié mais le processus optimisé. Même le produit ou le service n’est pas valorisé par contre le coût de production l’est.
La méthode AGILE est caractérisée par la recherche conjointe de la mise en valeur du salarié et l’obtention d’un produit de qualité dans le but de satisfaire l’utilisateur ou client final. La qualité du travail est valorisée. La méthode AGILE se situe au niveau de l’organisation du travail autour du collectif de travail. Le processus et les outils ne sont ciblés dans la méthode. La méthode pourrait se caractériser par un état d’esprit ou chaque personne de l’équipe est contributive à la réalisation du produit ou du service de qualité. Le collectif est important à l’image d’une mêlée de rugby. La communication, l’échange dans l’équipe sont essentiels dans la démarche AGILE. Les compétences de chacun en sont valorisées.
La démarche LEAN prend ses racines dans la production, la répétition même si des adaptations dans d’autres domaines existent, les mécanismes de parcellisation des activités sont au cœur de son application.
La démarche AGILE, issue du domaine de développement logiciel prend ses origines dans les défauts des méthodes archaïques autour de la rigidité du cycle de développement phasé. C’est dans le constat collectif de se sortir de cette spirale que la démarche AGILE nait.
C’est ainsi qu’il existe un Manifeste Agile international autour de quatre énoncés :
- Les individus et leurs interactions plus que les processus et les outils ;
- Des logiciels opérationnels plus qu’une documentation exhaustive ;
- La collaboration avec les clients plus que la négociation contractuelle ;
- L’adaptation au changement plus que le suivi d’un plan ;
et une douzaine de principes.
Sans faire un raccourci trop rapide mais LEAN répond à des objectifs de réductions de coûts immédiats alors qu’AGILE répond à des objectifs de satisfaction des acteurs en qualité d’utilisateurs ou clients et en qualité de réalisateurs.
Il y a des impacts positifs et négatifs de ces deux méthodes sur l’organisation du travail, mais aussi la santé et les bonnes conditions de travail des salariés
Il faut rapprocher les attendus des cadres en termes de travail et les concepts attachés au LEAN et AGILE. Mon propos est autour de l’hypothèse que le cadre veut s’approprier son travail, voire le ré-approprier et est en carence de prise de décisions d’expression de responsabilités dans un certain cadre d’autonomie revendiqué ou recherché. La recherche d’autonomie dans un collectif affirmé est un besoin dans son travail au quotidien et de ce fait les approches à caractères démocratiques sont relativement bien venues. Les deux composantes dans le travail à savoir l’autonomie et le collectif doivent s’exprimer pour l’affirmation du cadre dans son travail.
Et c’est dans cet axe de réflexion qu’il faut analyser les deux approches.
Elles sont fondamentalement différentes d’un point de vue ces deux composantes dans le travail.
Dans le LEAN le salarié est normalisé ce qui s’oppose à ce que nous attendons en tant que cadre ingénieur celui de mettre en œuvre son ingéniosité base de ce qui le caractérise.
Si la standardisation est nécessaire pour une meilleure communication ou pour des échanges précis pour autant elle ne doit pas s’opposer au développement intellect du cadre ou de l’ingénieur.
Sans faire une diversion mais l’analyse de ces deux démarches met en évidence la problématique portée par tous ces systèmes qualité qui formatent le travail dans des procédures ou instructions au détriment de l’ingéniosité créative attendue des ITC.
Que recherchons-nous dans la mise en œuvre de LEAN ? Des temps plus courts de production, une aliénation du salarié à son processus. Dans l’application du LEAN, les périodes non productives pourraient être utilisées pour la réflexion collective, la formation, à la rêverie où le cadre puise ses propositions innovantes, au contraire elles sont captées pour réduire les temps de production quitte à mettre en cause l’intégrité physique des salariés. Les salariés ne sont pas des machines qui appliquent inlassablement des procédures et instructions éditées par d’autres ou eux-mêmes mais bien des individus compétents réclamant le droit d’agir de réfléchir d’innover de mettre tout simplement leur savoir faire en œuvre. Le LEAN est la fermeture sur soi, il s’oppose au développement humain.
Dans AGILE la démarche est tout autre. Le collectif se retrouve, l’autonomie est renforcée, l’échange est valorisé. L’équipe reconstituée décide estime ensemble le travail à faire par étape régulière dans un objectif commun de proposer un produit ou un service opérationnel. La satisfaction du client est promue. L’Agilité c’est l’ouverture vers les autres.
AGILE une solution ?
La véritable problématique dans le travail c’est l’absence de démocratie technique. Le besoin de recouvrir cette notion dans le travail au quotidien est une urgence pour le bien être du salarié. Le cadre a besoin de cette dimension. L’autre dimension est la satisfaction de faire un travail de qualité.
Or la méthode AGILE rallie les deux. Elle renforce la démocratie technique, elle renforce la responsabilité collégiale et individuelle, elle se focalise sur le travail de qualité avant tout.
Deux composantes essentielles pour le bien être du salarié.
Pour autant le manager n’est pas effacé. Au contraire il se concentre sur l’expression des priorités, des moyens à mettre à disposition de son équipe, sur les points durs.
Mais un danger existe celui de confiner l’équipe autour du projet AGILE. En effet du fait du recentrage autour de l’autonomie de l’équipe les risques de coupures avec la vie des autres projets sont forts.
Les réussites des projets AGILE reposent sur le respect des énoncés de la charte et des ses principes adjacents.
Pour favoriser une bonne mise ne œuvre il faut d’une part respecter l’esprit de la charte, se donner des temps de sortie du projet AGILE, d’être vigilant aux besoins de garder le contact avec l’extérieur de l’équipe. Il faut dans la mise en œuvre une adaptation aux exigences individuelles. Enfin il faut jouer la carte de la démocratie technique et promouvoir le collectif. Et tout ceci est possible dans la démarche AGILE où le à faire est auto-défini par l’équipe suivant des priorités connues par tous.
La démarche AGILE c’est dans un sens une remise en cause des méthodes de travail autour des objectifs individuels freins à toute innovation ou prise d’initiative.
Dans une démarche AGILE, des rôles et des cérémonies la structure. La continuité, la régularité des étapes sont essentielles. La capacité à faire de l’équipe est régulièrement estimée pour justement éviter les pics d’activités. Mais attention là encore, l’esprit de la démarche n’étant pas de mettre une pression continuelle sur les acteurs mais bien de prendre en compte tous les aléas techniques et humains pour tenir l’objectif final et commun qu’est le service ou produit efficient et de qualité.
La pluridisciplinarité dans l’équipe dit la mêlée est renforcée parce que nécessaire. Nous sommes sur des vecteurs de coopération entre acteurs et non de concurrences.
C’est ainsi que les démarches de sous-traitance ne sont pas facilement intégrables dans un projet AGILE. Il faudra probablement travailler plus autour de la coopération avec des tiers.
Remettre en cause le management classique
Le management injonctif n’a pas sa place dans une démarche AGILE. Entre ce dernier et l’autogestion dans l’équipe il y a place à d’autres espaces pour le management collectif.
Si la démarche AGILE porte en elle des potentialités pour changer le travail et le mangement tout n’est pas idéal. Comme je l’ai dit il y a des risques de déviations dans sa mise en œuvre. Pour cela il faut en débattre avec les salariés.
Il me semble qu’il y a nécessité de confronter avec les salariés nos propositions alternatives de management et ces méthodes en rupture avec le management classique. Il faut organiser des espaces d’échanges avec les salariés.
Toutes les perspectives de remettre en cause le management classique sont à étudier à travailler.