Depuis le début de la crise du Covid-19, la santé des travailleur·se·s a été malmenée. Certain·e·s ont été contraint·e·s d’aller travailler tous les jours, sans masque ni protection, y compris dans des secteurs non essentiels pour lutter contre la pandémie. D’autres ont été épuisé·e·s en télétravail. Si le gouvernement se refuse à donner des chiffres, nous savons que de nombreux·ses salarié·e·s ont été contaminé·e·s sur le lieu de travail, que certain·e·s sont décédé·e·s tandis que d’autres auront de lourdes séquelles liées à leur passage en réanimation.
Aujourd’hui, tous les ministres, tous les patrons, n’ont qu’un seul mot en bouche : la reprise économique. Là encore, ils ont prévu de faire payer la crise aux travailleur·se·s. Pour certain·e·s, c’est le licencie- ment économique, pour d’autres le chômage partiel prolongé et pour celles et ceux qui bossent, c’est la course à la productivité au détriment de la santé.
La santé au travail a été et reste donc une question centrale. Parce que la santé est un droit humain fondamental, le travail ne doit pas être un facteur d’atteinte à la santé physique et mentale. Il doit au contraire permettre à toutes et tous, quel que soit l’âge, le métier, l’état de santé, de contribuer, par son utilité sociale, à l’activité collective. Cela passe par la nécessité d’adapter les postes de travail au lieu de multiplier les licenciements pour inaptitude.
Alors que la Constitution veut que « tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégué·e·s, à la détermination collective des conditions de travail », nous avons pu constater que gouvernement et patronat ont passé outre en imposant des modifications importantes des conditions de travail sans consulter les représentant·e·s du personnel. Aujourd’hui, ils souhaitent que la santé des travailleur·se·s soit soumise aux impératifs économiques en faisant prévaloir leurs profits sur notre santé.
Au travail, c’est nous qui risquons notre vie, c’est donc à nous de décider de nos conditions de travail ! Il est urgent de conquérir des droits nouveaux pour les travailleur·se·s !
De quoi avons-nous besoin ?
De salarié·e·s décideur·se·s collectivement de leurs conditions de travail : le gouvernement a profité du Covid-19 pour tenter de remettre en cause le droit de retrait en cas de danger grave et imminent. Nous revendiquons une protection intégrale contre toute forme de pression, de sanction liée à l’utilisation du droit de retrait.
De CSE consultés sur l’organisation du travail : les nouveaux comités sociaux et économiques (CSE), qui ont remplacé les comités d’entreprise, délégués du personnel et comités hygiène, sécurité et conditions de travail (CHSCT), ont dû affronter cette crise sans pouvoir jouer leur rôle de contrôle et de protection de la santé des travailleur·se·s. Les CSE ont été au mieux informés des décisions prises par les employeurs, souvent sans consultation sur les nouvelles organisations du travail liées à la continuation de l’activité ni sur le port et la nature des équipements de protection individuels (masques…).
De CSE et CHSCT consultés sur les conditions du télétravail : le confinement a conduit des millions de salarié·e·s à devoir rester chez elles et eux pour travailler. Les conditions de travail ont été souvent difficiles, les entreprises et établissements ne se sont pas préoccupé·e·s des moyens mis à disposition, des rythmes de travail difficiles, de la garde des enfants incombant souvent aux femmes…
De CHSCT et CSE efficaces capables de défendre le droit à la santé des travailleur·se·s : les CSE du secteur privé se sont retrouvés à gérer simultanément le chômage partiel, le risque économique, et les questions de santé au travail sans être formés sur ce sujet ni mobilisés spécialement. La disparition des CHSCT a pesé lourdement durant cette crise.
Pour renforcer le poids des représentant·e·s du personnel, il faut qu’elles et ils puissent s’appuyer sur l’avis collectif des travailleur·se·s qui doivent pouvoir discuter librement de leurs conditions de travail hors présence de la hiérarchie : nous revendiquons un droit à l’expression libre sur les conditions de travail et la santé au travail. Cela permet d’aborder aussi la question de la santé de la population locale et des conséquences sur l’environnement.
D’employeurs qui appliquent leur obligation de sécurité : le gouvernement n’a eu de cesse d’envoyer des signaux, comme la loi du 11 mai 2020 qui limite la responsabilité des employeurs « en tenant compte des compétences, du pouvoir et des moyens dont [celui-ci] disposait » ou via des guides et fiches métiers dont le contenu est bien inférieur aux dispositions du Code du travail. Le patronat n’a pas hésité à réclamer publiquement par lettre ouverte au ministère du Travail la révision de ses responsabilités de préservation de la santé des salarié·e·s, pourtant issues du droit européen. Nous exigeons au contraire un renforce- ment des sanctions pénales contre les employeurs qui mettent en danger, par leurs décisions, la santé physique et mentale des travailleur·se·s.
D’une inspection du travail sur le terrain qui oblige les employeurs à respecter le droit et la santé des salarié·e·s : alors que le pays traversait une grave crise sanitaire, le gouvernement a décidé d’inter- rompre toute forme de contrôle et d’intervention en entreprises par l’inspection du travail, les Carsat et les services de santé au travail, laissant les employeurs exposer massivement leurs salarié·e·s au Covid-19. La ministre du Travail a même été jus- qu’à suspendre l’ancien secrétaire de la CGT de l’inspection du travail, lui reprochant une procédure de référé contre une entreprise ne protégeant pas ses salarié·e·s.
De médecins du travail intervenant, en toute indépendance, sur ces nouveaux risques biologiques encourus par les salarié·e·s.
Négociation sur la santé au travail : attention danger !
Le 15 juin 2020, une négociation interprofessionnelle sur la santé au travail a débuté. Le gouvernement souhaite que celle-ci reprenne à son compte les conclusions d’un rapport de 2018 (dit rapport Lecocq) qui propose d’assouplir la réglementation et d’éviter aux employeurs des mises en cause judiciaires.
Fort·e·s de l’expérience de la période Covid-19, les représentant·e·s CGT exigent dans cette négociation que de nouveaux droits soient institués pour les salarié·e·s :
- le rétablissement de CHSCT dans le secteur privé avec des moyens renforcés, ou des droits semblables données à des commissions santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) étendues à toutes les entreprises quels que soient leurs taille, sites et services, avec de vrais moyens d’intervention ;
- une inspection du travail, une médecine du travail, des services prévention des Carsat aux pouvoirs, moyens et fonctions étendues ;
- une protection des salarié·e·s usant de leur droit de retrait ;
- l’interdiction de recourir à la sous-traitance et aux contrats précaires pour les opérations exposant à un risque grave ;
- l’interdiction de licencier les salarié·e·s pour inaptitude, avec maintien du salaire. L’activité doit être analysée pour adapter le travail au ou à la salarié·e qui conserve ainsi son métier. Le but n’est pas seulement le maintien dans l’emploi mais le maintien au travail ;
- la réparation intégrale des accidents du travail, la reconnaissance immédiate automatique de toutes les contaminations au Covid-19 pour les travailleur·se·s du public et du privé qui sont sorti·e·s de chez elles et eux pour aller travailler.