Le site du 105, un passé chargé d’histoire industrielle et sociale
Avant d’être le site de Thales AVS, le 105 du boulevard du Général Eisenhower a été le site de la CII, partie prenante de la saga de l’industrie informatique française.
Dans une première partie, couvrant la période 1963 à 1973, Gérald Veirier avait abordé l’histoire de la puissance publique dans l’industrie informatique française avec l’affaire Bull, l’abandon du Plan Calcul et l’opposition au plan européen.
Pour cet article, il souhaite orienter les projecteurs sur le contexte et les moments forts d’une mobilisation syndicale et sociale qui a marqué la région toulousaine au cours des années 1974 et 1975.
« La fusion de la Compagnie internationale pour l’informatique (CII) avec Honeywell Bull s’engage en 1974. En mai 1974, avec l’élection de Giscard d’Estaing Président de la République un tournant s’opère dans la politique économique et sociale du gouvernement avec une inflation galopante (+17 %), un chômage qui explose (542 100 soit + 24 %) et le bradage de secteurs industriels. Dans le même temps, les luttes et l’unité syndicale CGT/CFDT/FEN se renforcent.
Le « jeune » programme commun de la gauche redonne espoir.
Face aux difficultés commerciales de la CII par suite des atermoiements de ses actionnaires et des pouvoirs publics, deux stratégies s’opposent entre ceux qui veulent poursuivre l’expérience européenne et ceux qui optent pour une fusion avec Honeywell Bull.
Des tractations s’engagent dans le plus grand secret jusqu’à début 1975 entre les PDG des groupes français (celui de la CII n’a jamais été intégré dans la négociation), de Honeywell Bull et du gouvernement français, ce que reconnaîtra la direction de la CII lors d’un CCE en avril 1975.
Dès septembre 1974 la coordination CGT CII alerte dans une déclaration sur l’avenir de la CII : « L’annonce pour les deux ans à venir d’un arrêt de la croissance de l’entreprise va à l’encontre des possibilités offertes par le développement prévisible des techniques et des besoins en informatique. Malgré le financement public considérable qui a permis à la CII d’atteindre une taille conséquente, force est de constater que Thomson/ CGE se refusent à assumer les responsabilités d’un développement ultérieur nécessaire… »
La CGT réaffirme son attachement à une politique d’indépendance nationale ainsi que sa volonté de défendre l’emploi et les qualifications des salariés de la CII, « ce qui passe par la nationalisation seule perspective aux problèmes de l’industrie informatique. »
A la mi-septembre, la CGT de l’entreprise s’inquiète des informations distillées dans la presse nationale et locale qui annoncent l’avenir de la CII doit se jouer dans les semaines à venir. Or, critique le syndicat : « une fois de plus les travailleurs et leurs représentants sont tenus à l’écart des décisions qui vont se prendre ». La CGT insiste une fois encore sur la nécessaire nationalisation de la CII qui permettrait, même dans le système actuel, une sécurité de l’emploi et surtout la possibilité de développer une industrie nationale de l’informatique indépendante des monopoles étrangers. »
La suite en téléchargeant le document histoire de la CII à Thales, seconde partie.